"SE PROMENER D'UN PAS AGILE AU TEMPLE DE LA VÉRITÉ LA ROUTE EN ÉTAIT DIFFICILE" VOLTAIRE
avril 1, 2023
Exsultate, Jubilate !Dans le cadre du théâtre Mariinsky -rénové avec grâce et élégance- nous avons assisté dans la soirée du 2 Mai sur la chaîne de télévision Mezzo à un florilège de certains des plus beaux morceaux de musique et du bel canto.
Érigé en 1860 en hommage à la fille du tsar, ce théâtre dégage une étrange magie.
Au sceau de la pure jubilation, nous avons virevolté de ballets classiques -où a étincelé l’étoile Uliana Lopatkina- en ballets modernes parfaitement exécutés.
Au sceau de la fantaisie, nous avons eu le bonheur d’entendre une délicieuse version des Noces de Figaro, où le pianiste s’est révélé, virtuose.
Au sceau de la fraîcheur parfaitement travaillée, nous avons vu évoluer les charmantes têtes blondes du chœur des enfants de Mariinsky.
Au sceau de la diversité se sont succédés des morceaux de Tchaïkovski (il est vrai qu’on s’attendait à le voir interprété en pareil équipage à Saint-Pétersbourg) des airs de musique orthodoxe sacrée (la vérité nous oblige à dire que nous ne nous attarderons pas sur ces passages lors que nous ne sommes pas fascinés par la musique sacrée.)
Au demeurant les costumes y étaient resplendissants, quoiqu’ un peu chargés à notre goût.
Au sceau du tourbillon jaillirent les Noces de Figaro, Carmen, la Habanera, le Barbier de Séville, et un délicieux air du Voyage à Reims.
Les costumes y étaient vifs et fort bellement portés.
On ne sait d’ailleurs pourquoi les Russes affectionnent tant cet opéra qui y est joué plus souvent qu’à son tour dans la patrie des tsars.
Les costumes parfaitement assortis aux morceaux interprétés, les décors magnifiques et dans le ton. Aucune fausse note dans cette soirée !
Afin de ne pas être nous attirer immédiatement les foudres d’un lecteur impatient, exécutons donc un brisé ou une cabriole- tout ébloui et tout ouïe devant un Placido Domingo égal à lui-même ; c’est-à-dire enjoué, charmeur, bref en ténor au mieux de sa forme.
Deux secondes lui suffirent pour séduire son public.
Et puis
« Exsultate, Jubilate,O vos animae beatae »
La grande, l’incomparable, la superbe et impériale Anna Netrebko !
Lorsqu’elle habille Macbeth elle se révèle une grande, une formidable tragédienne !
Elle en habille le drame sobrement et efficacement !
Adorable beauté vêtue d’une somptueuse robe fourreau, elle sut se montrer économe dans son port et dans ses transports.
Aucun geste inutile, la simplicité faite perfection !
Sa tessiture parfaite mais ensorceleuse !
De Macbeth à Yolanta en passant sans interruption – à des airs plus joyeux elle en possède tous les registres, elle en joue avec une joyeuse maestria !
Avoir eu l’immense bonheur de l’entendre -encore dernièrement salle Pleyel- jouer Yolanta, nous n’en avons été que plus émus.
Que le lecteur nous pardonne, nous nous sommes amusés à comparer, note pour note, différents morceaux exécutés par la Callas et Netrebko.
A notre humble avis, sauf dans Casta Diva, ou la Callas – servie par un visage à la beauté tragique – Anna Netrebko nous paraît aujourd’hui la digne héritière de la Callas.
Digne héritière, sinon supérieure à tout le moins égale !
Au sceau de la vérité Anna Netrebko est Anna Netrebko !
Anna Netrebko ce sont de merveilleux yeux noirs tantôt espiègles, tantôt trahissant les peines les plus profondes de l’âme humaine !
Mais ce sont avant tout des yeux ensorceleurs !
Anna Netrebko, c’est un port altier qui vous fait don de sa complicité espiègle !
Un sourire ravageur qui fait chavirer toute la salle.
Saluons -à ce propos- le visage sombre et fermé de Poutine. L’ex colonel du redoutable KGB et-« apprenti- démocrate au petit pied » (comment le nommer autrement) a visiblement gardé de l’époque bolchevique l’air engoncé et gourmé qu’il était de bon ton-alors- d’afficher à la tristement célèbre Loubianka.
Au sceau de la gaieté, cette formidable soirée fut marquée !
Lorsque le ténor Placido Domingo prit l’espace d’un instant la baguette du chef d’orchestre – au demeurant excellent – Valéry Cergiev – ce fut un moment magique.
Et lorsque le, frais émoulu, chef d’orchestre joignit sa voix à René Papé dans « la cidarem la mano » le public fut comblé d’aise.
Lors qu’Anna Netrebko interpréta « la cidarem la mano » -une trouvaille géniale – le ballet des roses.
Une plaisanterie certes, mais qui finalement ponctue à merveille le livret du délicieux libertin qu’était Lorenzo da Ponte.
La grâce et la beauté d’Anna Netrebko firent corps avec les roses. Génial !
Au sceau de la perfection, Madame Netrebko, personne ne songera à vous disputer votre place !
Signalons encore une particularité. Il semble qu’en Russie- le respect du public (à l’opéra en tout cas- dans la vie civile – nous n’oserions pas nous aventurer aussi loin) soit la règle.
Tradition des ballets et costumes qui n’excluent pas des inventions de bon aloi parce que parfaitement justifiées et parfaitement classiques dans leur modernité.
Le lecteur nous pardonnera – du moins l’espérons nous- de citer Dumas Père pour le désavouer aussitôt !
Dumas, disait à propos de la Dame aux Camélias « Ce ne sont pas des femmes comme il faut mais ce sont des femmes qu’il nous faut ».
Gageons avec le lecteur que si Dumas avait entendu et vu, la divine Anna Netrebko, il n’eut point prononcé ce trait d’esprit au demeurant fort spirituel. Un dernier conseil : sous aucun prétexte ne ratez Anna Netrebko la prochaine fois qu’elle se produira.
Leo Keller
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