"SE PROMENER D'UN PAS AGILE AU TEMPLE DE LA VÉRITÉ LA ROUTE EN ÉTAIT DIFFICILE" VOLTAIRE

juin 5, 2023

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Les Frères musulmans jordaniens: acteur politique et social central, toujours sur le fil Par Anne-Clémentine Larroque Professeure Sciences-Po

Les Frères musulmans jordaniens : acteur politique et social central, toujours sur le fil
Par Anne-Clémentine Larroque 

Depuis le printemps 2015, les Frères musulmans jordaniens vivent des heures difficiles. Après une scission du groupe et des mises en question récurrentes de leur légitimité électorale par la Couronne, leur positionnement est systématiquement remis en cause. Pourtant, depuis fin 2016, leur retour à l’éligibilité entraîne l’élection de plusieurs de leurs membres aux scrutins nationaux et locaux. Cela traduit la réalité d’une présence toujours acquise au sein des élites jordaniennes et de l’héritage de leurs réseaux communs avec le Hamas palestinien.

La perspective des élections législatives en septembre 2020 marque un nouveau tournant pour les ambitions politiques du Front d’action islamique (FAI), émanation politique des Frères musulmans en Jordanie. À l’instar des groupes fréristes de la région, leurs relations avec le dirigeant en titre, le roi Abdallah II (depuis 1999), oscillent entre instrumentalisation et intimidations de la Couronne.
Le contexte du conflit israélo-palestinien, des révolutions arabes et de la montée en puissance du djihadisme dans le voisinage direct et sur le sol jordanien a conduit la monarchie à adopter une politique pragmatique face au FAI, qui demeure la première force d’opposition du pays.
La monarchie jordanienne fait figure d’État le plus stable dans la région la plus déstabilisée du monde. Pourtant, Abdallah II doit faire face à des acteurs régionaux et intérieurs capables d’amenuiser son autorité.

Boycottant les élections depuis 1993 – où ils avaient obtenu 17 sièges sur 80 –, les Frères jordaniens se remettent dans la course électorale en 2016 pour contrebalancer les différentes scissions internes dont la survenue ne fut pas étrangère aux actions des services de renseignement agissant sous la houlette du roi, lui-même influencé par la répression égyptienne de la confrérie à partir de 2013. La législation en matière de scrutin constitue le levier ultime dont dispose et joue la monarchie pour orienter le champ d’action des partis d’opposition, et précisément le FAI, dont l’ADN complexe est relié à l’histoire de la Couronne hachémite.

Des origines complexes

La confrérie s’est d’abord enracinée en Palestine mandataire (1920-1948) puis s’est dotée d’une seconde branche transjordanienne, aujourd’hui disparue, précédant ainsi la création du royaume hachémite en 1946. Elle porte donc en elle, dès les origines, un foyer à la fois national et international.

La confrérie des Frères musulmans créée en Égypte en 1928 et déterminée à lutter contre la présence occidentale au Moyen-Orient se tourne dès les années 1930 vers la Palestine sous mandat britannique. D’Égypte et de Palestine, les Frères musulmans développent leurs premiers groupes armés, et leur leader, Izzedine al-Qassam (1882-1935), est arrêté et exécuté en Transjordanie en 1935.
Le mouvement frériste s’est d’abord ancré en Palestine avant d’évoluer en Jordanie avec un groupe autonome à partir de 1942 et la création de la Confrérie des Frères musulmans de Jordanie, constituée politiquement en 1946 par Abdel Latif Abou Qura. Dans les années 1950, à l’instar de l’Arabie saoudite, la Jordanie voit affluer des Frères musulmans d’Égypte fuyant la répression nassérienne. Ces derniers viennent apporter des appuis aux groupes éponymes formés depuis 20 ans dans la région.

En Jordanie, les Frères musulmans ne sont pas des activistes militants incontrôlables. Au contraire, ils sont considérés comme des partenaires modérés par le roi Hussein (1952-1999), maillon indispensable d’une chaîne lui permettant de créer du lien social et de renforcer sa légitimité. Ils organisent sur le territoire un maillage de bienfaisance avec des ONG et des fonds provenant des monarchies du Golfe. Ils deviennent même les alliés de la Couronne contre les insurgés de gauche proches du mouvement laïciste baasiste. Les chefs d’État autoritaires de la région ont d’ailleurs systématiquement utilisé le panislamisme comme rempart contre le socialisme. La Jordanie n’a donc pas fait exception.

En 1989, Hussein accepte le résultat électoral favorable à la confrérie, qui parvient à obtenir un quart des sièges aux législatives. Cependant, la famille frériste se divise entre une aile acquise aux rouages électoraux imposés par la monarchie et l’autre, plus radicale, qui s’indigne contre une capitulation du mouvement face à l’appareil d’État.
La comparaison établie entre les Frères jordaniens et leurs homologues du Maroc devient évidente à partir de 1999, quand les deux souverains, Abdallah II et Mohamed VI, arrivent au pouvoir avec la ferme intention d’ouvrir leur pays aux capitaux étrangers et au libéralisme en même temps qu’ils assurent la pérennité d’un conservatisme social et religieux à leur population.
Dans les deux des monarchies, les Frères musulmans sont surveillés comme le lait sur le feu. Ce phénomène s’est en réalité amorcé à partir de 1989, au moment des retours des moudjahidines d’Afghanistan. À l’aune d’un amalgame entre islamistes et djihadistes, le risque de laisser une occasion politique aux islamistes – de tout bord – a été évalué avec minutie.
À partir de la décennie suivante, les partis fréristes se dotent de statuts reconnus par les monarques qui leur permettent de participer aux législatives. En 1998, le parti des islamistes marocains devient le Parti de la justice et du développement (PJD), six ans après la création du FAI en Jordanie, le bras politique de la confrérie. À l’instar du roi Hassan II (1961-1999), Hussein assure la stabilité de son royaume en alternant, à l’égard des Frères musulmans, les périodes de contrôle avec des temps de plus grande liberté d’action. En 1993, conscient de leur omniprésence au sein des classes moyennes comme dans les milieux plus modestes, Hussein change le mode de scrutin pour contrer un succès potentiel du FAI.

Dans ces conditions, et depuis l’arrivée d’Abdallah II, qui leur est publiquement défavorable, les islamistes boycottent alternativement les élections et s’associent aux candidats laïcs et conservateurs pour incarner de manière moins visible une opposition pourtant réelle. Un changement structurel devenu inévitable a cependant eu lieu en mai 2016. Sous la pression des revendications populaires des années 2011-2012, la loi électorale favorisant le vote pour un électeur plutôt que pour un parti est abrogée, et remplacée par une autre qui instaure le scrutin proportionnel plurinominal ; autrement dit, le FAI peut retrouver une visibilité en politique.

La confrérie comme leader d’opposition des « printemps arabes »

Les « printemps arabes » amorcés en Tunisie en décembre 2010 ont investi le monde arabo-musulman au printemps 2011. Sans être directement concernée par le renversement, la Jordanie tout entière a suivi heure par heure le soulèvement de son voisin égyptien.

Ces révolutions ont paradoxalement conforté les régimes autocratiques du Golfe, en Arabie saoudite, à Bahreïn, mais aussi en Jordanie. Depuis son arrivée au pouvoir, Abdallah II a construit le fil de sa politique dans la continuité de celle de son père tout en marquant l’ouverture du régime vers une monarchie constitutionnelle plus équilibrée (réforme de 2011) et surtout en imposant une hyper-libéralisation de l’économie.
Son objectif majeur est alors de réduire l’influence des deux grands acteurs empêchant la modernisation et la libéralisation : les tribus et les Frères musulmans. De manière générale, sa position contraint les islamistes à accepter son autorité. Après les accords de Charm el-Cheikh en septembre 1999, le monarque décide ainsi de fermer le bureau du Hamas en Jordanie.
L’alignement politique sur la ligne israélienne est consacré.

Le royaume ne connaîtra pas de « printemps », mais il en captera les effluves qui donneront alors de l’espoir aux jeunes comme aux organisations d’opposition. Le roi, chef des armées et garant de l’unité de l’État, reste la figure de proue d’un pouvoir autoritaire.
Mais à partir de 2011, émergent en Jordanie des mouvements de contestation. Des meetings s’organisent à Amman et la critique du manque de débouchés pour les jeunes est pointée du doigt. Le roi et les services de renseignement contiennent cependant la vindicte populaire. À l’automne 2012, les Frères musulmans parviennent à mobiliser plusieurs milliers de Jordaniens pour contester les timides actions de la monarchie en direction du peuple.

La symbolique du « pas en avant » des régimes autocratiques a deux grandes vocations : apaiser la grogne sociale et assurer les partenaires extérieurs de la garantie de leur modernité. En Jordanie, Abdallah II permet aux Frères musulmans de se présenter et de diriger la coalition nationale pour la réforme aux législatives de 2016. Ils obtiennent 15 sièges, dont 10 pour le FAI, et s’imposent comme garants de la transparence et de la bonne marche du processus électoral. Ils ont d’ailleurs boycotté les législatives de 2010 et 2013, jugées frauduleuses.
Parallèlement à cette avancée, la confrérie bénéficie de la loi sur la décentralisation votée en 2015 et appliquée aux élections municipales du 15 août 2017 : les citoyens élisent des conseils locaux dont le nombre varie en fonction de la taille de la ville (1).
À l’échelle locale, les islamistes refont surface. À Zarka, seconde agglomération la plus peuplée du royaume, le FAI obtient 11 sièges sur 30 des six conseils locaux de la ville. L’avancée est patente et la démocratie devient pour les Frères musulmans la seule planche de salut.

Un alignement idéologique très politique

Tout comme pour les membres du PJD marocain ou d’Ennahdha en Tunisie, la communication des Frères musulmans jordaniens à propos de la démocratie demeure sans nuance : elle constitue le seul modèle politique qu’ils soutiennent âprement. Le processus de démocratisation représente l’issue la plus favorable pour assurer un avenir certain aux différentes structures islamistes ou post-islamistes du Maghreb et du Machrek.
Les cadres actuels des partis politiques ont tous vécu sous régime autoritaire et l’ouverture des « printemps arabes » a véritablement tracé la voie à une reconquête politique en Tunisie ou au Maroc. Zaki Bani Irsheid, un des leaders du FAI, a décrit ce moment spécial pour la population du pays :
« Ce mouvement spontané a transformé nos manières de penser. En 2011, tous les Jordaniens étaient accrochés à leur poste de télévision pour suivre les événements en Égypte et en Tunisie. C’est un tournant historique pour les régimes en place comme pour toutes les organisations politiques » (2).
Cofondateur du mouvement, Zaki Bani Irsheid se présente comme un réformiste, ouvert et écouté au niveau international. Proche des intellectuels islamistes marocains et tunisiens, il insiste sur la pression exercée par l’État sur les cadres de son parti et les limites qui leur sont imposées.

Cependant, il admet que depuis les révolutions de 2011, aucunement anticipées par les autorités, la confrérie a pu bénéficier d’un espace politique nouveau et a pu devenir un interlocuteur d’une nouvelle dimension pour accompagner les transformations démocratiques en cours.
Son discours s’inscrit dans la rhétorique moderniste des idées défendues par le PJD ou Ennahdha depuis leur arrivée aux affaires. Le discours de l’islamiste prône la liberté, la bonne gouvernance, la participation citoyenne et l’idée d’une transition du régime monarchique jordanien vers davantage de constitutionnalité.
Pas une fois, la religion n’est abordée. Aussi, leur conception de la démocratie est-elle plus institutionnelle que réellement idéologique, et les mots réforme, participation et élections retentissent beaucoup plus souvent que l’égalité hommes-femmes ou la liberté de conscience.

Ainsi, le discours traduit une volonté commune de mettre en place une politique de conciliation, comme le répète le leader tunisien Rached Ghannouchi lorsqu’il s’exprime sur le sujet. Mais si Ennahdha est parvenu à s’arroger une place au sein de l’appareil de pouvoir tunisien, le FAI n’a pas encore imposé sa présence comme contre-pouvoir à la Couronne et aux services de renseignement. Les Frères musulmans jordaniens contestent l’incomplétude d’une démocratie qui peine à se frayer une voie sur la scène politique d’un pays considéré comme ouvert et libéral. Ils rappellent que la Constitution, qui n’a pas été votée par le peuple, date de 1952 et ils déplorent le peu de pouvoirs dont est doté un Parlement trop dépendant des orientations de la Couronne.
« Il n’y a pas de réelle démocratisation en Jordanie, mais une apparence de démocratie, il faut donc se débarrasser des apparences », confiait Zaki Bani Irsheid. Pourtant, la contestation de 2011 imprègne encore les idées du peuple jordanien et la confrérie entend bien ne pas oublier ce message.

Le FAI s’implique ouvertement dans la lutte contre le salafisme. Depuis le début des années 1990, des rivalités entre oulémas saoudiens génèrent des divisions dans la famille islamiste. La naissance d’un mouvement saoudien nouveau et réformiste, la Sahwa (de l’arabe al-sahwa al-islamiyya, le « réveil islamique »), accrédite la thèse de la rupture avec le wahhabisme traditionnel.

Ce mouvement né dans les années 1980, influencé par les Frères musulmans, prend en compte l’ancrage national et se tourne vers un islamisme plus politique. Il est la manifestation de la séparation idéologique des Frères musulmans et des salafistes ; elle deviendra géopolitique dans la décennie suivante, y compris en Jordanie. En effet, après le 11 septembre 2011, les liens obscurs établis entre certains Frères musulmans jordaniens et Al-Qaïda semblent assainis.
Le choix du réformisme prend le pas sur celui de la révolution et du djihad armé, en tous cas dans le discours officiel. Les Frères musulmans jordaniens associent désormais les thèses salafistes au salafo-djihadisme et donc à des idéologies de fanatisés. Selon eux, la création de l’organisation de l’État islamique (EI ou Daech) serait une manifestation de la contre-révolution générée par les « printemps arabes », qui avaient fait perdre du terrain au discours fanatique.
De nombreuses hypothèses de manipulations sécuritaires persistent en revanche dans le discours islamiste soucieux d’éviter les amalgames avec les djihadistes. Ainsi, la défense des valeurs démocratiques demeure le rempart actuel contre la survivance de leurs liaisons d’antan avec les groupes terroristes de la région.

Les Frères musulmans jordaniens à l’épreuve des questionnements

Le pouvoir hachémite manœuvre habilement entre contrôle et division de la formation politique islamiste depuis 1999. La crédibilité et la confiance acquises par les Frères au sein de la population jordanienne au fil des décennies s’affirment au moment des « printemps arabes » comme dans de nombreux pays touchés par cette vague, et ce malgré le putsch contre le président Mohamed Morsi en 2013 en Égypte.
Sa chute entérine la visibilité des Frères musulmans égyptiens, mais permet aux bureaux étrangers voisins de tirer les conséquences de cette mue opérée par chaque groupe frériste arrivé au pouvoir par la voie démocratique. Abdallah II ne saurait ignorer la réalité de l’opportunité politique existant pour le groupe islamiste après les victoires fréristes en Tunisie et au Maroc.
En effet, dans ces deux pays, Ennhadha et le PJD ont obtenu la majorité des voix à chaque élection législative depuis 2011. Dans ce cadre, le gouvernement jordanien attend l’occasion d’agir contre le FAI dont les statuts juridiques ne peuvent plus être ceux d’un groupe politique, mais ceux d’une association nationalement ancrée, n’ayant plus de liens avec le bureau égyptien et dont les membres ont dû s’exiler depuis fin 2013.
Deux groupes se forment parmi les membres du FAI : d’un côté, les partisans d’une rupture avec l’Égypte, défenseurs des enjeux nationaux (les « colombes ») ; de l’autre, ceux enclins à la conservation du FAI tel qu’il a été défini depuis 1946 (les « faucons »). Ces deux tendances idéologiques ne sont pas nouvelles et divisent le mouvement depuis les années 2000. En 2012, les « colombes » concrétisent leur position par l’Initiative de Zamzam, dont les bases se constituent en parti, appelé Zamzam, en août 2016.

Cela vient asseoir le discrédit lancé sur la confrérie, le 15 février 2015, lorsque Zaki Bani Irsheid, faucon historique du FAI, est interpellé et incarcéré pour purger une peine de 18 mois de prison. Il avait critiqué sur son compte Facebook les Émirats arabes unis, qu’il avait accusés de financer le terrorisme dans la région. Le règlement de compte devient alors médiatisé et nuit à la mouvance islamiste.

Ainsi, la Couronne jordanienne ne manque pas de jouer avec les paradoxes ; elle est alliée géopolitiquement aux deux plus grandes puissances anti-fréristes du Golfe : l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, mais elle tolère l’existence politique du FAI et en orchestre l’éligibilité. Un exercice d’équilibriste qui montre à quel point le pouvoir a besoin de conserver une adhésion parmi ses élites et les familles qui tiennent le pays.
Dans ce cadre, le royaume hachémite mise sur sa légitimité religieuse pour ne pas laisser la part belle aux associations islamistes, Frères musulmans comme salafistes. En effet, depuis l’implosion de la Syrie voisine, des groupes de bienfaisance wahhabites saoudiens proposent aux réfugiés une aide mensuelle trois fois supérieure à celle de l’ONU, en échange d’une assiduité quotidienne à la mosquée. Les Frères musulmans jordaniens, opposés au soft power saoudien, ne peuvent perdre le terrain de la prédication. Trois acteurs se confrontent ainsi sur le plan religieux, ce qui n’est pas sans influence sur le terrain politique.

Pour imposer son leadership religieux, Abdallah II a fait reconnaître en avril 2013 par l’Autorité palestinienne sa légitimité historique de protecteur des Lieux saints de Jérusalem, notamment l’Esplanade des mosquées. Il tisse également un réseau de coopération en matière religieuse avec des États tels que la Tunisie. En effet, en juin 2019, a été conclu à Amman un accord entre les ministères des Affaires religieuses tunisien et jordanien pour la mise en place d’un mémorandum d’entente visant à créer un partage d’expériences sur la pratique des imams et les valeurs défendues par un islam modéré et tolérant.
En clair, il s’agit aussi pour le gouvernement jordanien d’exister sur ces enjeux qui ne doivent pas rester l’apanage du discours frériste et être écartés de l’influence saoudienne. Les Frères musulmans jordaniens continuent de communiquer et de participer à des meetings internationaux en se défendant, quand on les interroge, d’appartenir à une organisation internationale dépendant du Bureau égyptien. Ils s’envisagent plutôt comme une structure d’entente comparable à l’Internationale socialiste du XIXe siècle.

Le royaume hachémite, grand témoin discret de la dislocation du Moyen-Orient depuis 2011, comprend une autorité monarchique dotée de la quasi-totalité des pouvoirs politiques demeurant très dépendante des aléas géopolitiques régionaux, seules issues pour les mouvements d’opposition.
Ainsi, les Frères musulmans jordaniens disposent d’un foyer politique divisé et sous contrôle de la Couronne. Néanmoins, ils peuvent compter sur une assise internationale encore reliée au Bureau égyptien dont les transformations depuis 2013 ont recomposé de nouvelles attaches territoriales, notamment en Turquie et au Qatar. L’enjeu d’une nationalisation plus ancrée du FAI détermine le destin du groupe islamiste jordanien prêt à la normalisation, car toujours enclin à l’adaptation. Tout comme la grammaire d’action de l’idéologie frériste s’inscrit dans le temps long, l’émancipation du peuple jordanien existera dans un délai plus long, et les Frères musulmans comptent coûte que coûte l’accompagner.

Anne-Clémentine Larroque
Historienne de formation, spécialiste de l’idéologie islamiste, Anne-Clémentine Larroque est une remarquable maître de conférences en questions internationales et en culture générale à Sciences Po (Paris). Anne-Clémentine est également chercheuse associée au CEDEJ du Caire.

Elle est désormais rattachée au Ministère de la Justice comme analyste
Elle a aussi travaillé à l’Institut du Monde Arabe de 2005 à 2007 et a participé à la Matinale de France Inter (la Chronique Internationale, été 2013).
Elle intervient également régulièrement sur France 3 ou sur différents plateaux télévision.
Son dernier essai : l’islamisme au pouvoir, Tunisie, Egypte, Maroc (PUF, 2018), de Géopolitique des islamismes (« Que sais-je ? », PUF, 2e ed. 2016) et coauteure de Sortir du Bataclan. Récits et analyses (Bréal, 2016). Son livre Géopolitique des islamismes a été réédité à plusieurs reprises.
Certains écrivains sont publiés de leur vivant dans la Pléiade, d’autres, comme elles, sont croquées très jeunes dans Charlie Hebdo. Redoutable honneur mais combien mérité.
https://blogazoi.growmodo.dev/2017/12/10/geopolitique-des-islamismes-par-anne-clementine-larroque-desormais-croquee-par-charlie-hebdo/

Anne- Clémentine Larroque est également finaliste du Prix Brienne, prix du livre géopolitique 2018

Pouvoirs n°169 – avril 2019 – Les démocratures – p.85-96
Référence électronique : Anne-Clémentine LARROQUE, « Les printemps arabes : un espoir pour la démocrature ? », Pouvoirs, revue française d’études constitutionnelles et politiques, n°169, 169 – Les démocratures, p.85-96. Consulté le 2019-05-29 09:35:12 . URL : https://revue-pouvoirs.fr/Les-printemps-arabes-un-espoir.html

NOTES

(1) Camille Abescat, « Le retour du Front d’action islamique sur la scène politique locale en Jordanie. Étude de cas de la municipalité de Zarqa », in Confluences Méditerranée, 2019/3, no 110, p. 43-54.

(2) Entretien avec l’auteure, Amman, 2018.
Cet article a été publié dans la revue  Moyen-orient Numéro 47 juillet septembre et nous les remercions de leur autorisation pour la publication.

MOYEN-ORIENT N° 47

MOYEN-ORIENT N° 47

Anne-Clémentine Larroque a par ailleurs écrit le texte de l’émission le dessous des cartes consacrée à ce sujet
https://www.youtube.com/watch?v=ipYor2uSpgE&fbclid=IwAR2Ac300Wa88mVMgDFawg37sEyW16pWuYp6vzOEt7qdryw8rndFUTGae1zM

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