"SE PROMENER D'UN PAS AGILE AU TEMPLE DE LA VÉRITÉ LA ROUTE EN ÉTAIT DIFFICILE" VOLTAIRE
avril 1, 2023
Riccardo Perissich ha passato ventiquattro anni a Bruxelles alla Commissione europea dove è stato, tra l’altro, Capo di Gabinetto di Altiero Spinelli e direttore Generale del Mercato Interno e dell’Industria, Ha poi avuto incarichi al vertice di gruppi industriali italiani. Ora dirige il Consiglio Italia/USA. Scrive regolarmente di politica ed economia internazionale. E’ anche l’autore di tre romanzi di spionaggio.
Riccardo Perissich a passé 24 ans à la Commissione européenne où il a été notamment chef de cabinet de Altiero Spinelli, directeur général du Marché intérieur et de l’industrie. Il a ensuite rejoint la direction de divers groupes industriels italiens (Pirelli, Telecom italia…). Il dirige actuellement le Council for Italia and the United States. Il publie régulièrement des analyses de politique et économie internationale et est l’auteur de trois romans d’espionnage.
Voici l’article de Riccardo Perissich publié dans la newsletter du prestigieux Aspen Institute Italy (traduit de l’italien).Nous remercions également Anne Treca pour sa traduction impeccable comme d’habitude.
L’esquive de Macron.
En faisant un grand discours sur l’Europe, quelques heures à peine après le résultat des élections allemandes qui risquent de rendre plus difficile la relance de l’intégration européenne, Emmanuel Macron a fait un choix jugé risqué par certains. Pourtant, le jeune Président français a tenu l’engagement qu’il avait pris, tout en étant conscient du risque qu’il prenait d’être jugé détaché de la réalité face à un contexte politique allemand peu enclin à passer du coq à l’âne. D’un autre coté Macron aurait aussitôt été accusé de renoncer à l’un des deux piliers sur lesquels il avait construit sa campagne électorale s’il s’était désisté ou s’il avait beaucoup édulcoré son discours. Pour l’instant au moins, il a évité ces deux pièges avec adresse, et a réussi à prononcer un discours europeiste de haut vol, avec la juste conjugaison de pulsion idéale , de pédagogie et de substance concrète.
Il est évident que tout le monde l’attendait sur les propositions les plus controversées de réforme de l’Euro-zone. Il a en revanche habilement déplacé les points forts du discours sur des thèmes beaucoup plus vastes. A commencer par la défense, la protection des frontières et la sécurité de l’Europe. Pas vraiment l’armée européenne mais une série de mesures concrètes qui y ressemblent beaucoup.
En politique étrangère, il donne la priorité à l’Afrique, et sur l’immigration une série d’ouvertures nouvelles en France qui seront certainement très appréciées à Rome. Vient ensuite une longue batterie de mesures pour renforcer la compétitivité de l’économie européenne et consolider son modèle social : de la fiscalité et l’européisation des systèmes éducatifs à la sécurité alimentaire et au renforcement des instruments de politique commerciale.
Certains points du programme peuvent bien sur être jugées trop dirigistes et trop “français” , comme toujours quand un Français parle de “protection”. De même s’agissant de la fiscalité , où l’on peut considérer excessive l’idée d’harmoniser non seulement l’assiette imposable mais aussi le taux d’imposition sur les sociétés. Le même doute s’installe pour ce qui est de l’harmonisation des charges sociales.
En insistant sur le renforcement des structures économiques et sociales de l’Europe, ce discours devrait réussir à éviter des critiques focalisées sur les propositions controversées de réforme de l’Eurozone. Au moins dans l’immédiat. D’ailleurs cela ne suffira peut-être pas. A ce sujet, Macron a ajusté le tir, sans ajouter de détails notables à des propositions déjà exprimées ces derniers mois. Ses propositions de créer un ministre des finances de l’Eurozone, de transformer l’ESM en un fonds monétaire européen et d’instaurer un budget de l’Eurozone sont toujours sur la table, mais avec des précisions.
Le budget de l’Eurozone servirait à amortir les éventuels chocs soudains de la conjoncture et à financer des investissements d’intérêt commun. Il est toutefois précisé que les nouveaux instruments ne serviront pas à mutualiser les risques (donc pas d’euro-obligations) . Il pose par ailleurs comme condition au progrès la réalisation de nécessaires réformes structurelles et le respect des règles par chacun. Tout ceci ne suffira pas à endiguer la perplexité des Allemands mais devrait au moins permettre de lancer la discussion. Il y a aussi dans l’édifice de Macron des indices à lire attentivement et à prendre au sérieux à Rome aussi pour ne pas trop s’illusionner.
Macron évite soigneusement le mot fédéral mais bon nombre des instruments qu’il avance préfigurent un système plus fédéral. Sur la partie institutionnelle le discours reste néanmoins prudent. A cet égard, l’approche macronienne relève de la tradition fonctionnaliste, celle des progrès graduels où l’évolution des institutions suit celle des politiques. On relève la disparition de l’idée d’institutions séparées et notamment d’un parlement de l’eurozone, probablement pour tenir compte des objections insistantes de Juncker. Mais Macron relance l’idée de listes transnationales pour les élections du parlement européen, avec la réduction drastique du nombre de commissaires européens à 15. Une idée très discutée mais qui contribuerait au renforcement de l’efficacité et de l’autorité politique de la Commission.
Pour finir il y a la question de la méthode. Certaines propositions exigeraient une réforme du Traité, mais tout est inscrit dans un processus évolutif à l’horizon de 2024. Le problème de la révision du traité ne devrait donc pas se poser à court terme. Macron adhère entièrement à la perspective d’une intégration différenciée avec des avant-gardes libres d’avancer , mais ouvertes. Il maintient cependant l’unité du système institutionnel.
Il y a moins de quinze jours, Juncker avait ouvert son discours au parlement européen en parlant de “fenêtre d’opportunité” et de nouveau “vent dans les voiles” de l’Europe. Les élections allemandes ont suscité des craintes, peut être excessives, que la fenêtre puisse se refermer prématurément et que les voiles faseyent. Le discours de Macron, qui à beaucoup d’égards rejoint celui du président de la commission, tente de remettre du vent dans les voiles. Il est trop tôt pour savoir s’il s’agit d’un courant d’air ou d’une brise soutenue.
Il va falloir donner à la politique allemande le temps de se stabiliser: Il est très peu probable que ceci suffise à ce que Macron soit invité d’honneur au prochain congrès du parti libéral allemand mais il serait surprenant que la nouvelle coalition installée à Berlin se prive d’une vraie confrontation. Les paroles de Macron donnant d’ailleurs l’impression d’avoir été soigneusement étudiées pour aider Angela Merkel dans sa mission.
Macron a conclu son discours en rappelant une autre occasion historique : le discours de Robert Schuman du 9 mai 1950. On est évidemment très loin de l’approche conçue par Jean Monnet à l’époque qui parlait d’une “avancée sur un point limité mais décisif” à propos de la mise en commun du potentiel carbo-sidérurgique. Les propositions de Macron ont un champs d’application beaucoup plus vaste. On peut voir cela comme la conséquence inévitable du succès de ce “point limité mais décisif”.
De plus, la formulation d’un éventail de propositions qui risquent d’être critiquées comme un carnet de rêves a l’avantage d’élargir le débat et d’éviter des blocages trop rapides. Il y a cependant un point commun dans la méthode : comme Schuman et Monnet, Macron propose de commencer à débattre avec qui veut sans attendre les autres. Le gouvernement italien semble avoir reçu le message 5 sur 5, mais ce n’est pas le cas de toutes les forces politiques.
Riccardo Perissich.
Washington le 29 Septembre 2017
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